Abandonnant pour un temps
les créatures de l’enfer que sont Frankenstein et Dracula, Terence
Fisher nous livre ici un film d’aventure mâtiné de thriller
horrifique.
Classique des films
« coloniaux », celui-ci est situé en Inde (ancienne
colonie britannique) au milieu du 19ème siècle.
Ce type de métrage est
toujours à la limite du racisme, proposant de montrer les bienfaits
de la civilisation face à la barbarie des indigènes. Ici, une secte
d’Indiens adorateurs de Kali, dont les membres sont bien évidemment
cruels et amoraux, baignant dans une forme de mysticisme d’un autre
temps. En face, on trouve le classique gentleman anglais qui
n’écoutant que son courage va tout faire pour démasquer cette
secte ultrasecrète.
Sauf que Fisher, comme
pour donner un contrepoids à ce colonialisme bon teint, multiplie
les piques envers le colonisateur britannique. Montrant son
incompétence, sa fausse humilité, sa méconnaissance de l’Inde
profonde, sa volonté de faire du profit sur le dos des habitants
sans se soucier ni de leur santé, ni de leur bien-être. Ils peuvent
bien s’entretuer, du moment que les profits de la compagnie des
Indes sont préservés, tout ira bien.
Sans non plus prétendre
que Fisher ait voulu réaliser un film anti-colonial (faut pas
déconner non plus), son approche est suffisamment singulière pour
l’époque pour le noter.
Et le film en lui-même
me direz-vous ?
La faiblesse du budget
est cette fois un petit handicap. Difficile de faire croire à une
Inde grouillante de vie, de cultures et de croyances avec si peu de
lieux différents (une place de marché, quelques arpents de brousse,
trois ou quatre intérieurs et un morceau de jungle là où se
tiennent les cérémonies de la secte des étrangleurs) et si peu de
figurants.
Néanmoins, avec un grand
sens du rythme, « Les étrangleurs de Bombay » se suit
sans ennui et avec intérêt. Les rebondissements sont nombreux, les
personnages bien campés (quoique caricaturaux comme il sied à ce
type de métrage) par des acteurs qui font le métier. Les scènes de
cruauté sont nombreuses et d’une grande violence pour l’époque,
que ce soit physiquement : langue arrachée, yeux crevés, mains
coupées notamment (tout cela se déroule hors champ, on est en 1960)
ou morales : un des membres de la secte est obligé d’étrangler
son frère afin de ne pas fâcher la déesse Kali. Dommage cependant
que la couleur soit absente, cela aurait probablement donné plus de
forces à ces scènes.
L’exotisme n’est
également pas oublié avec un fort joli combat entre un serpent et
une mangouste.
Aventure, amour, courage,
horreur, exotisme, rythme, que demande le peuple ?